« Je prenais le mot palmier et décidais de le considérer dans deux sens : le sens de gâteau et le sens d’arbre. Le considérant dans le sens de gâteau, je cherchais à le marier par la préposition à avec un autre mot susceptible lui-même d’être pris dans deux sens différents ; j’obtenais ainsi (et c’était là, je le répète, un grand et long travail) un palmier (gâteau) à restauration (restaurant où l’on sert des gâteaux) ; ce qui me donnait d’autre part un palmier (arbre) à restauration (sens de rétablissement d’une dynastie sur un trône). De là le palmier de la place des Trophées consacré à la restauration de la dynastie des Talou. »
Raymond Roussel, Comment j'ai écrit certains de mes livres
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« Cet obsédé que fut médicalement Raymond Roussel, cet obsédé du langage, de l’identité et du double a construit un prodigieux labyrinthe de glace où les choses sont prises, reflétées, esquivées, dédoublées, cachées et montrées par les mots qui sont leur miroir. Et dans ce jeu le plus simple mais doué d’un extraordinaire pouvoir de vertige, la perception méticuleuse du réel et le vagabondage astral de l’imaginaire sont l’un et l’autre indissociablement captifs. Par le jeu de l’identique et de la répétition, du même et du double, le langage est capable de tout cela à la fois. De la simple coquille du mot peut jaillir une déflagration qui en un seul éclair nous donne la couleur réelle et modeste des choses et la grande lumière du rêve. »
Michel Foucault, Raymond Roussel
« Nous pénétrons dans un salon mortuaire des années 30. On nous invite à nous asseoir autour d’un cercueil de verre où gît le cadavre de Raymond Roussel," suicidé" à Palerme le 23 juillet 1933. À côté du cercueil, une dame de compagnie en grande tenue, incarnant Carlotta, femme paravent de l’auteur qui raconte ses déboires littéraires tout au long de sa vie. Il évoque tous ses échecs de publications, Impressions d’Afrique ( 22 ans pour écouler les exemplaires imprimés !), L’Étoile au front, Locus Solus salué dans la presse comme Blocus Solus ! L’acteur sort de son cercueil en proie au doute, verse des verres de vin, pendant que le pianiste se déchaîne. "Je me suis toujours proposé d’expliquer comment j’ai écrit certains de mes livres". Le pianiste chante pendant qu’il évoque la construction de son écriture. Les associations de mots fusent dans une folie linguistique : "Morgue, le lieu où l’on expose les cadavres, je m’arrêterai sur ce mot pris dans les 2 sens". Carlotta se lève, prend l’auteur par la main et l’aide à s’allonger dans son cercueil. Nous sortons de ce spectacle énigmatique, plein d’humour noir dans le plus grand silence. »
Edith Rappoport, Journal de bord d'une accro au théâtre
« Précurseur des surréalistes, de l'écriture automatique et des préconisations de l'Ouvroir de Littérature Potentielle (L'OULIPO), Raymond Roussel, écrivain français mort à Palerme le 14 juillet 1933 est assurément un personnage étonnant ! Incarné ici dans un cercueil de verre par Laurent Charpentier, ce génie des mots extravagant, grand voyageur et travailleur acharné revient d'outre tombe pour nous dévoiler sa technique de composition de ses romans... Notons que si les adaptations théâtrales de l'auteur n'ont pas spécialement connu le succès, elles auront certainement suscité la controverse ! Une veillée loin d'être funèbre proposée par Laurent Charpentier ci gît et Mirabelle Rousseau en maîtresse de cérémonie, avec au piano (La Veuve joyeuse, mais pas que) Nicolas Ducloux. »
Jean-Yves Bertrand, Revue Spectacles
Lire la critique de Martine Piazzon dans FroggyDelight
Lire la critique de Caroline Chatelet dans revue Agôn